Le podcast « Corinna et le roi » donne la parole à son ex-maîtresse. Sur HBO, la série documentaire « Sauver le roi » décortique, elle, la protection dont il a bénéficié pour taire ces scandales.

Le dernier roman-feuilleton à la mode en Espagne raconte les aventures d’un roi tombé fou amoureux d’une belle et brillante femme d’affaires étrangère de vingt-cinq ans sa cadette, au point de l’installer dans une maison à deux pas de la résidence royale, de l’inonder de lettres et de cadeaux, de ne rien lui cacher de sa vie monotone avec la reine, mais aussi de ses petits arrangements financiers ou de ses généreux amis du Golfe. Au point, finalement, d’en perdre son trône. Il y a de la romance, du suspense, de l’argent et des espions. Tout pour en faire un soap opera de consommation facile de plus, aussi addictif que trivial. A la différence que cette fois-ci, le récit est raconté à la première personne par la sulfureuse et bien réelle ex-maîtresse du roi émérite d’Espagne Juan Carlos, Corinna zu Sayn-Wittgenstein-Sayn, et qu’une grande part, au moins, est vraie.

Diffusé depuis le 7 novembre, à raison d’un épisode par semaine, le podcast « Corinna et le roi » a déjà été téléchargé par plus de 350 000 personnes. Chaque lundi, il tient en haleine les Espagnols avec son lot de détails scabreux sur la vie privée de l’ancien roi d’Espagne. Produit par le studio Project Brazen, cofondé par les journalistes britanniques Tom Wright et Bradley Hope, avec la compagnie de programmes radiophoniques PRX, c’est un ovni journalistique. Découpé en huit épisodes de 40 minutes, il fait la part belle au récit de Corinna, uniquement ponctué de quelques interviews d’historiens et biographes, comme Paul Preston, Pilar Eyre et Laurence Debray, de journalistes espagnols de renom ou d’anciens espions, remettant ses propos dans leur contexte historique ou politique. Le tout est enrobé d’une mise en scène digne d’un roman à l’eau de rose, parsemée de commérages, de détails insipides ou humiliants, et des commentaires convenus et binaires de la narratrice. Le résultat est à la fois fascinant et dérangeant.
Amitiés troubles et train de vie fastueux

En septembre, sur HBO, c’est une série documentaire originale, Salvar el rey (Sauver le roi), accablante pour l’ancien monarque, qui a fait un tabac sur la plate-forme audiovisuelle. Nourrie de nombreux témoignages, elle relate comment l’appareil de l’Etat et les médias ont couvert durant des années le comportement peu éthique du monarque, ses amitiés troubles et son train de vie fastueux, neutralisé ses nombreuses amantes et caché ses écarts, enrobés d’un sentiment d’impunité, avant de laisser la presse s’en emparer pour mieux le pousser vers l’abdication, perçue comme la dernière solution pour sauver la monarchie. Là aussi, le documentaire fait la part belle à d’anciennes maîtresses du roi, comme l’ancienne vedette de la télévision Barbara Rey qui, en 1997, se disait harcelée par les services secrets et avait menacé de révéler des secrets d’Etat, ou la photographe de presse Queca Campillo, qui avait enregistré leur histoire sur des dizaines de cassettes.

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